El guiñapo ("L'epave", G. Brassens)

Con música y letra de Georges Brassens en "L'epave"  y adaptación de J. M. Grande


EL GUIÑAPO ("L'épave" Georges Brassens)
(ADAPTACIÓN: J. M. Grande 2020)


A Baco apelaré, invocaré a Baco:
el dueño del mesón, auténtico bellaco,
por no poder pagar me acaba de expulsar.
En vino me gasté, bebí como un cosaco,
todo mi dineral: me expulsó por borracho...
¡Me da igual, el mesonero es especial!

Descalzo alguien pasó durmiendo yo la mona.
"Está muerto -pensó- este ya no es persona"
Mis zapatos cogió (la cosa más normal) 
¡Qué triste desgraciao, los pobres daban asco:
seguro que cayó camino de Damasco...
¡Me da igual, el vagabundo era especial!

Un estudiante vio de noche mi camisa;
sin dudar la cogió, quizá llevara prisa;
pero al salir el sol debió sentarle mal:
¡Vaya desilusión ponerse aquel andrajo
-me parte el corazón verle con tal colgajo...-
¡Me es igual, ese estudiante era especial!

La mujer de un peón cogió mis pantalones
"¡Por Dios, señora, no: patadas a montones 
les dieron por detrás tal que la parte anal
tiene ventilación; puede que su marido
sufra congelación: no lo haga se lo pido...!"
¡Le da igual, la esposa no era muy normal!

Desnudo me quedé mostrando mis vergüenzas
una puta pasó, entonces se avergüenza,
ella que verá al mes cientos, no diré más, 
que las maneja y que las prueba por docenas,
va y me denuncia por exhibición obscena...
¡Me da igual, esa puta era alguien especial!

En esto que llegó, no lo había previsto,
un poli que me vio; gritó: ¡Por jesucristo:
usted no va a aguantar este tiempo glacial.
Tal vez con pleuresía acabe usted, amigo.!
Y se desabrochó y me tendió su abrigo...
¡No da igual, aquel poli aquel era especial!

Desde aquel día yo, reputado fantasma,
que siempre había gritao: "¡Guerra y muerte a la pasma!"
me tuve que callar y poner un bozal.
Y cuando lo he intentao: mi lengua avergonzada
tropieza sin querer, no puede decir nada...
¡No es normal! ¡Qué rara es la época actual!



VERSIÓN ORIGINAL

L'épave
(G. Brassens)

J'en appelle à Bacchus ! A Bacchus j'en appelle !
Le tavernier du coin vient d'me la bailler belle.
De son établiss'ment j'étais l'meilleur pilier.
Quand j'eus bu tous mes sous, il me mit à la porte
En disant : " Les poivrots, le diable les emporte ! "
Ça n'fait rien, il y a des bistrots bien singuliers...

Un certain va-nu-pieds qui passe et me trouve ivre
Mort, croyant tout de bon que j'ai cessé de vivre
(Vous auriez fait pareil), s'en prit à mes souliers.
Pauvre homme ! vu l'état piteux de mes godasses,
Je dout' qu'il trouve avec son chemin de Damas-se.
Ça n'fait rien, il y a des passants bien singuliers...

Un étudiant miteux s'en prit à ma liquette
Qui, à la faveur d'la nuit lui avait paru coquette,
Mais en plein jour ses yeux ont dû se dessiller.
Je l'plains de tout mon cœur, pauvre enfant, s'il l'a mise,
Vu que, d'un homme heureux, c'était loin d'êtr' la ch'mise.
Ça n'fait rien, y a des étudiants bien singuliers...

La femm' d'un ouvrier s'en prit à ma culotte.
" Pas ça, madam', pas ça, mille et un coups de bottes
Ont tant usé le fond que, si vous essayiez
D'la mettre à votr' mari, bientôt, je vous en fiche
Mon billet, il aurait du verglas sur les miches. "
Ça n'fait rien, il y a des ménages bien singuliers...

Et j'étais là, tout nu, sur le bord du trottoir-e
Exhibant, malgré moi, mes humbles génitoires.
Une petit' vertu rentrant de travailler,
Elle qui, chaque soir, en voyait un' douzaine,
Courut dire aux agents : " J'ai vu que'qu' chos' d'obscène ! "
Ça n'fait rien, il y a des tapins bien singuliers...

Le r'présentant d'la loi vint, d'un pas débonnaire.
Sitôt qu'il m'aperçut il s'écria : " Tonnerre !
On est en plein hiver et si vous vous geliez ! "
Et de peur que j'n'attrape une fluxion d'poitrine,
Le bougre, il me couvrit avec sa pèlerine.
Ça n'fait rien, il y a des flics bien singuliers...

Et depuis ce jour-là, moi, le fier, le bravache,
Moi, dont le cri de guerr' fut toujours " Mort aux vaches ! "
Plus une seule fois je n'ai pu le brailler.
J'essaye bien encor, mais ma langue honteuse
Retombe lourdement dans ma bouche pâteuse.
Ça n'fait rien, nous vivons un temps bien singulier...

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